Ce qu’il faut retenir de la note intitulée : Guinée, le piège Constitutionnel: une rigidité exorbitante qui étouffe la démocratie et le développement.

Ici, le piège serait plutôt de ne pas décortiquer la présente note afin de mettre en évidence son caractère scientifiquement limité. En effet, depuis la présentation de l’avant-projet de la nouvelle Constitution et sa mise en ligne, les réactions sont nombreuses. Cela est normal. Car il s’agit de l’un des chantiers où la transition est le plus attendu. Mais autant ces réactions sont légitimes, autant elles se doivent être objectives. Malheureusement, certaines contributions s’emberlificotent dans des démonstrations partiales, partielles et sélectives.

C’est le cas visiblement de cette note intitulée « Guinée, le piège Constitutionnel: une rigidité exorbitante qui étouffe la démocratie et le développement » rédigée par un certain Monsieur Aboubacar FOFANA et publiée sur Guineenews.org.

Dès les propos introductifs, l’auteur, qui ne donne pas assez d’informations sur lui, s’attaque à l’article 198 de l’avant-projet de la nouvelle Conctitution portant les modalités de révision constitutionnelle. Dans ses propos liminaires, il affirme, chose étonnante pour un intellectuel, que cet article mérite « une critique acerbe à la lumière des principes du droit constitutionnel » si tant est que ces derniers seraient d’accord avec lui. Il va structurer cette analyse autour de cinq (5) principales préoccupations.

En premier lieu. Il parle de la concentration des pouvoirs et des risques de manipulation politique au moyen de l’article 198. Doit-on parler ici d’ignorance ou de mauvaise foi ? On serait aidé si l’auteur avait décliné son profil, mais hélas. Alors, dans ce cas, on parle des deux : ignorance et mauvaise foi. En effet, affirmez que l’article 198 confère au Président de la République une influence considérable sur le processus de révision constitutionnelle, c’est ubuesque. Pour lui, cet article donne l’initiative exclusive au seul Président de la République pour la révision de la constitution et qu’il viole la séparation des pouvoirs. Ces affirmations sont tellement déconnectées, hors sol, qu’on aurait cru que cet auteur a lu un autre projet de constitution. Car, en vertu de l’article 198 de l’avant-projet de la nouvelle Constitution, il resssort en substance que l’initiative de la révision de la Constitution appartient concurremment au Président de la République et aux membres du Parlement. Quelque soit l’initaiteur, le constituant guinéen a rendu théoriquement le mécanisme si conditionné qu’il est même qualifié par cerains observateurs, comme inedit. Plus de 14 barrières à franchir dont chaune ne peut l’être qu’avec tous les acteurs.

Aucun acteur, fut-il le Président de la République, ne peut initier le projet sans les autres (Parlement, citoyens avec le droit de pétition) à plus forte raision le mener jusqu’à son terme (impossible pour cet article 198, soyons sérieux un peu).

En deuxième lieu. L’auteur parle d’exigences de participation au référendum et démission du Gouvernement. Sincèrement, cet auteur se prend facilement dans le piège de l’incohérence. Là encore, il s’oppose à l’une des barrières, pas des moindres, celle liée au référendum constitutionnel. Le constituant guinéen exige la participation effective de 60% des électeurs inscrits pour que le référendum soit pris en considération. Il renforce le mécanisme en posant comme autres conditions, que le Gouvernement présente sa démission qui ne peut être réfusée par le Président de la République et qu’aucun membre du Gouvernement ne peut être promu à une fonction équivalente ou supérieure jusqu’au terme du mandat en cours du Président de la République.

Au lieu de recriminer l’article 198, bien au contraire, l’auteur aurait dû trouver un écho favorable. Car, il verrouille et intimide toute révision fantaisiste. Toute révision qui a pour objectif de maintenir la stabilité gouvernementale et la continuité des politiques publiques, comme affirme l’auteur, ne saurait être empêchée par un peuple responsable et éclairé.

En troisième lieu. L’auteur évoque les procédures de pétition et exclusion de la révision en dernière année de mandat. L’une des innovations majeures de cet avant-projet de nouvelle Constitution est le droit de pétition. S’attaquer pour s’attaquer, l’auteur semble être en cours d’arguments de sorte qu’il n’a pas d’autres choix que de s’indigner sur les conditions d’exercice de ce droit. Le constituant a proposé un dixième des signatures des électeurs inscrits et l’auteur, quelle est sa proposition ? Attention, celle du constituant est justifiée et étayée au prisme des données crédibles, il ne s’agit pas de chiffres fantaisistes.

Aussi, l’auteur s’offusque de toute interdiction de révision constitutionnelle durant la dernière année du mandat. C’est quand même difficile de suivre cet auteur dans sa démarche. Il affirme qu’une telle restriction pourrait nuire à la flexibilité et à la réactivité de la Constitution face aux besoins de la société. Mais de quelle flexibilité et de quels besoins? Au fur et à mesure qu’on avance dans la lecture de cet auteur, on se demande que veut-il, est-il au service de quelle cause? C’est quand même ahurissant de s’opposer à toute forme d’interdiction de changement constitutionnel durant la dernière année du mandat d’un Président avec un risque élevé de velléité.

En quatrième lieu. M. Fofana, aborde la question des révisions avant 30 ans et leurs implications, pour lui, ce délai est excessif et rigide, que cela pourrait rendre difficile l’adaptation de la Constitution à des évolutions politiques, sociales ou économiques imprévues. Ici, les arguments sont mitigés. C’est un choix. Pas besoin d’insister outre mesure.

En cinquième et dernier lieu. L’auteur parle de l’absence de mécanisme de contrôle de révisions. Selon lui, l’article 198 ne mentionne pas de garde-fous pour vérifier que les révisions ne violent pas des principes fondamentaux ou des droits humains. Il dit que l’absence d’une telle supervision peut ouvrir la voie à des révisions qui pourraient compromettre les valeurs démocratiques ou les droits fondamentaux. Ce dernier cas de figure montre le caractère léger et agressif de l’auteur. Il ne semble pas maitriser la méthode de commentaire et d’interprétation exégétique. Sinon, il est même reproché au constituant d’avoir envisagé trop de garde-fous.

L’auteur termine en affirmant que l’article 198 de l’avant-projet de la nouvelle Constitution présente plusieurs problèmes qui, en vérité, n’existent que dans sa propre pensée.

 

 

 

 

Dr Kalil Aissata KEITA, Conseiller du PCNT en charge des questions Institutionnelles et Administratives