Procès du 28 septembre 2009 : ‘’ il y a eu des militaires, je ne sais d’où ils venaient qui ont essayé de s’introduire dans l’hôpital, et ils ont même jeté une grenade… ‘’ Témoigne Prof. Namory Keita
Après la comparution de la Directrice Générale de l’Hôpital National Donka au moment des événements du 28 septembre 2009, c’est au tour de Professeur Namory Keïta, médecin dans le même hôpital de donner sa part de témoignage ce lundi 29 janvier 2024.
« J’ai entendu à la radio comme tout le monde, qu’il devait y avoir une manifestation au stade du 28 septembre. En passant devant le stade à 7h 20mn, pratiquement il n’y avait personne à part des commerçants comme tous les jours. Je rentre à l’hôpital, après les contrôles, je suis allé m’installer dans mon bureau, et j’ai commencé à travailler. Après j’ai entendu des bruits. Au début je pensais que c’était des bruits passagers. Après j’ai constaté que ces bruits étaient répétitifs. J’ai compris donc que c’était des tirs. J’ai appelé un de mes assistants, lui demander s’il avait entendu la même chose que moi, il m’a dit :’’ Oui ! J’ai l’impression que ces bruits viennent du stade’’ Donc je suis resté dans mon bureau. 1h après, le même assistant revient me dire qu’il y a des blessés graves au stade. Et qu’il y a aussi des femmes qui ont été violées », a-t-il déclaré.
Face à cette situation critique, quelques agents de l’hôpital ont décidé de prendre des ambulances et se rendre au stade, pour prendre des blessés raconte ce médecin
« Arrivés à l’esplanade, il n’y avait pas grand-chose. Mais le stade était fermé. Je suis descendu avec l’infirmière pour demander aux policiers, c’était les policiers casqués, vêtus en bleu, je crois que c’était les antigangs. Je me suis présenté au policier qui était devant moi, en lui disant que nous sommes venus chercher des blessés s’il y en a. Il m’a dit d’attendre jusqu’à ce qu’il demande l’autorisation à la hiérarchie. Je lui ai dit qu’il faut qu’on prenne des blessés en charge. Il a pris le téléphone et est allé passer un appel, puis revenir vers nous. Il me dit, << ne vous en faîtes pas, nous n’en avons pas besoin. Nous avons tout ce qu’il faut pour prendre en charge les blessés. Et nous allons vous les envoyer à l’hôpital, si nécessaire », a fait savoir ce médecin.
Vu que l’accès n’a pas été possible, le professeur Namory Keïta et son équipe se sont dirigés dans le quartier.
« Nous avons donc décidé d’aller dans les quartiers, parce qu’on nous avait informé à l’hôpital qu’il y avait des blessés qui étaient couchés dans les quartiers. Particulièrement à Dixinn-Bora, à Landréah port, et dans le quartier de Dixinn. Nous sommes ainsi sortis avec les 5 ambulances se suivant pour aller dans les quartiers. A Landréah port, nous avons été suivi par un patrouille de bérets rouge, qui nous a arrêté pour nous dire, << de toutes les façons, tous ceux qui ont fait des conneries, nous allons les avoir et les sanctionner à la hauteur de leur forfaiture>>. Je lui ai dit que moi, j’étais médecin, que je n’avais rien à voir avec quoi que ce soit. J’essaye de faire mon travail. L’anesthésiste qui était avec moi m’a dit, de ne discuter avec personne, il faut qu’on continue. Sur ce fait, ils nous ont laissé aller sans violence. Dans le quartier, comme il y avait beaucoup de bérets rouges, les gens avaient peur de dire qu’ils ont hébergé des blessés. Ils nous faisaient signe avec les mains. Nous aussi on leur a signalé qu’on allait revenir après. Après le tour dans les quartiers, on a réussi à prendre des blessés. Il n’y avait pas de blessés graves. Ainsi on les a déposés à l’hôpital pour des soins” , affirme le professeur Namory Keïta.
Poursuivant sa narration, il a par ailleurs affirmé qu’il y a eu des militaires qui ont essayé de s’introduire à l’intérieur de l’hôpital pour chercher des blessés.
« Je ne sais d’où ils venaient, il y avait des militaires qui ont essayé de s’introduire dans l’hôpital. Et ils ont même jeté une grenade dans la cour en créant de la panique. Peu après, la situation s’est calmée. On a commencé à recevoir les femmes qui ont été violées », a-t-il conclu. Ce lundi 29 janvier 2024 à la barre, devant le tribunal criminel.
Mimi Bangoura, pour lerenifleur224.com