Guinée: l’épouse d’Habib Marouane Camara en appelle au chef de l’État suite à l’enlèvement du journaliste

Dans une lettre adressée au président de la transition, Mariama Lamarana Diallo, compagne d’Habib Marouane Camara, journaliste enlevé à Conakry le 3 décembre 2024, en appelle à Mamadi Doumbouya « après avoir frappé à toutes les portes, en vain, pour avoir des nouvelles de [son] cher époux ». Car des témoins de l’enlèvement soutiennent que ce sont des gendarmes qui ont kidnappé le reporter. « Ce ne sont pas des assaillants, ce ne sont pas des gens venus d’ailleurs »,

Bientôt deux semaines sans nouvelles du journaliste guinéen Habib Marouane Camara. Le directeur du site d’informations Le Révélateur 224 a été enlevé le 3 décembre 2024 dans la soirée, en banlieue de Conakry, alors qu’il se rendait chez l’homme d’affaires Kerfalla Person Camara, dit « KPC ». En chemin, le reporter avait été arrêté et violemment agressé par des gendarmes, selon les témoins, avant d’être transporté vers une destination inconnue. L’ouverture d’une enquête pour « arrestation arbitraire et séquestration » a ensuite officiellement été annoncée, mais ni la justice ni le gouvernement n’ont communiqué sur son évolution depuis.

Après ce cinquième cas de kidnapping enregistré à Conakry sur les douze derniers mois, l’épouse d’Habib Marouane Camara a écrit une lettre ouverte au président de la transition, pour lui crier sa détresse.

« Aujourd’hui, je n’ai pas d’autre choix que de faire recours à vous, après avoir frappé à toutes les portes, en vain, pour avoir des nouvelles de mon cher époux. » Le ton de la lettre de Mariama Lamarana Diallo est digne, mais ne cache pas sa détresse.

Car, après la disparition de son mari, la journaliste et épouse d’Habib Marouane Camara s’est rendue au tribunal de Dixinn, à la cour d’appel de Conakry, à la direction centrale de la Police judiciaire, au Haut-commandement de la gendarmerie, « dans l’espoir, chaque fois, de trouver une oreille attentive pour entendre mon cri ou de rencontrer un interlocuteur qui pourrait éclairer ma lanterne ».

Elle interpelle désormais le général Mamadi Doumbouya, car les témoins de l’enlèvement soutiennent que ce sont des gendarmes qui ont kidnappé son compagnon : « Ce ne sont pas des assaillants, ce ne sont pas des gens venus d’ailleurs. Ce sont des Guinéens comme moi. La meilleure manière, ça aurait été de procéder normalement, après une plainte. Et, après la DPJ [Direction de la police judiciaire, NDLR], c’est de transférer le dossier devant un tribunal pour qu’il réponde devant ces faits. »

Actuellement enceinte, Mariama Lamarana Diallo interpelle également le chef de l’État en tant que père de famille. « Vous êtes un époux et un père aussi, donc, vous connaissez les liens forts et émotionnels qui existent entre mari et femme, père et enfants. […] Je suis confrontée à la peine des enfants privés de leur père », se désole-t-elle.

Le cadet de quatre ans souffre d’une infirmité motrice cérébrale (IMC), mais c’est l’aîné de six ans qui reste inconsolable : « C’est lui mon cas le plus difficile. Parce que, à tout moment, il me demande : « Maman, pourquoi papa ne rentre pas à la maison ? Papa a voyagé ? Mais pourquoi il ne m’appelle pas au téléphone comme d’habitude ? » Je lui dis que c’est parce qu’il n’y a pas de réseau. Donc j’essaye un peu de détourner son attention avec ça, mais je ne pense pas pouvoir tenir vraiment longtemps. »

Quatre jours après la publication de sa lettre, Mariama Lamarana Diallo n’a reçu aucune réponse de la présidence ou du gouvernement. Elle n’exclut pas de porter cette nouvelle affaire de disparition forcée au niveau international.

 

 

 

 

 

Avec RFI