Techniques de couverture d’un procès sensible : Plusieurs journalistes en formation à Conakry sous initiative de la Cellule de Communication du procès du 28 septembre
En droite ligne avec l’exigence constitutionnelle et au regard des nombreuses bavures communicationnelles qui affectent les médias dans le traitement de l’information judiciaire, la cellule de communication du procès des évènements du 28 septembre 2009 a entrepris ce jeudi 14 décembre 2023 une session de renforcement des compétences professionnelles de quatre-vingt journalistes des médias publics et privés sur la problématique de la communication judicaire liée à la couverture d’un procès sensible.
Pour cette première cohorte de formation quarante (40) journalistes du public et du privé seront outillés pendant trois (3) jours sur plusieurs thématiques telles que le Fact-checking, la technique de couverture d’un procès sensible, mais aussi l’usage des concepts juridiques. La cérémonie de lancement des travaux a été lancé par la Secrétaire Générale du Ministère de la Justice et des Droits de l’Homme représentant le ministre de la justice Alphonse Charles Wright en mission à l’étranger. A cette cérémonie qui s’est tenue dans la salle de conférence du Ministère de la Justice et des Droits de l’Homme, on pouvait aussi noter la présence de certains cadres du département de la justice, du Coordonnateur de l’Unité des Gestion du procès des évènements du 28 septembre ainsi que d’autres invités de circonstance.
Lerenifleur224.com vous propose le discours intégral de la secrétaire Générale du Ministère de la Justice et des Droits de l’Homme, Marie Irène Hadjimalis
Monsieur le Conseil Principal
Monsieur l’inspecteur général des Services judiciaires et pénitentiaires
Madame la cheffe de la DAF
Monsieur le Coordonnateur UGP
Monsieur le Président de la cellule de communication du procès
Mesdames et Messieurs
En ma qualité de présidente de l’ouverture de cette session de formation, permettez-moi, au nom de Monsieur le Garde des sceaux, Ministre de la Justice et des droits de l’homme, de vous exprimer tout l’honneur et le grand plaisir d’y participer.
Je saisis l’occasion, qui m’est offerte, pour rendre un hommage appuyé aux autorités de la transition, sous la conduite éclairée de Monsieur le Président de la République, Chef suprême des armées, le Colonel Mamadi DOUMBOUYA pour les efforts qu’elles fournissent en faveur de la justice guinéenne, dans le cadre de la restauration des droits et libertés fondamentaux des citoyens guinéens.
Je témoigne que le ministère de la Justice et des droits de l’homme, sous la direction, de monsieur le Garde des sceaux ministre de la justice et des droits de l’homme, ne ménage aucun effort pour la réussite du procès et une judicieuse administration de la justice.
A ce jour, le procès sur les événements du 28 septembre 2009 se tient dans le respect des principes et règles qui régissent le procès pénal. Les opinions nationale et internationale sont ponctuellement informées par les organes de médias sans restriction, sans entrave, témoignant ainsi de la transparence voulue par les autorités de la transition.
Je salue les efforts de coordination de la Cellule de communication et de l’unité de gestion du procès pour leur dynamisme et leur proactivité dans la gestion de la collecte, le traitement et la diffusion de l’Information autour des évènements du 28 septembre 2009.
Le présent atelier de formation s’inscrit dans cette dynamique de renforcement des capacités des journalistes, en vue de booster leur professionnalisme dans le contexte actuel de la transition.
Mesdames et Messieurs les journalistes,
Les thèmes et sous-thèmes à l’ordre du jour des présentes assises sont d’une importance et pertinence capitales car ils portent sur les grandes préoccupations du moment. Les organes de presse et des médias effectuent au quotidien des veilles sur l’actualité législative, jurisprudentielle, judiciaire et sur les activités de la chancellerie.
Garant de la bonne transmission de l’information, il doit faire preuve d’une grande rigueur dans la rédaction d’articles ainsi que pour ses enquêtes. La vulgarisation du droit est une de ses principales missions, il cherche à rendre l’information compréhensible pour tous. Ainsi, il est celui qui établit un lien fort entre l’appareil judiciaire et les citoyens.La chronique judiciaire consiste en un exercice unique : assister à une audience et en rendre compte à des personnes qui, pour la quasi-totalité d’entre elles, n’y assistent pas. Il s’agit donc d’un travail en trois temps : d’abord l’observation, ensuite l’écriture, enfin la diffusion
En théorie, les chroniqueurs judiciaires peuvent « couvrir », selon le terme employé dans le jargon journalistique, toutes sortes d’audiences civiles, pénales, commerciales, sociales, des référés dans le cabinet du juge, des réunions de la Cour des comptes et la Cour Suprême.
Le présent séminaire, à mon avis, vise à articuler sémiotiquement une information particulière, c’est-à-dire par la représentation, au moyen d’un signifiant, entendez par un symbole ou un signe, un signifié quelconque, qui peut être une situation, un événement ou un objet.
La chronique judiciaire ou l’information juridique comporte un certain nombre de problèmes liés à la couverture médiatique du procès. Cette chronique se concentre sur la nature narrative du procès pénal, en tant que discours et sur la différence entre l’énoncé et l’énonciation. Elle met également en évidence les rôles factoriels, actuariels, médiatiques et juridiques par rapport aux problèmes de la décision judiciaire ou de l’interprétation de la loi, d’une part, et d’opinion publique, d’autre part. Elle suscite le débat sur le régime de vraisemblance et de véridiction par rapport aux preuves judiciaires.
Mesdames et Messieurs
L’importance du rôle des médias dans le domaine de la justice, qu’elle soit civile, commerciale, pénale ou administrative est consubstantielle au droit du public de recevoir des informations sur les activités des autorités judiciaires et des services de police, à travers les médias ; ce qui implique de pouvoir rendre compte, en toute vérité, du fonctionnement du système de justice pénale.
Le journalisme est essentiel pour tenir les gouvernements et les décideurs publics responsables de leurs actions et décisions.
Des informations crédibles et opportunes sur les activités des cours et tribunaux, des services de sécurité et de défense sont essentielles pour renforcer la confiance du public dans ces services et conforter l’autorité de l’Etat. Les journalistes, qui œuvrent pour l’intérêt public, doivent constituer une source essentielle d’informations impartiales et structurelles sur le secteur de la justice et de la sécurité et contribuent à la sensibilisation du public.
Mesdames et Messieurs
Le droit d’information, exercé par les journalistes, est assujetti au respect du secret de l’instruction, parce qu’en raison de la présomption d’innocence et de la protection de la vie privée les éléments de procédure concernant une personne poursuivie ne doivent pas être divulgués. Le journaliste qui a connaissance du secret de l’enquête est soumis aux mêmes obligations de tout professionnel dépositaire d’un secret inviolable.
Le secret de l’instruction est violé dès lors qu’un acte de la juridiction d’instruction a été réalisée en présence d’un journaliste qui en a capté le déroulement par le son ou l’image. L’une des conséquences de la violation du secret de l’instruction pourrait être la nullité de la procédure et de l’acte de procédure, par exemple la perquisition.
Donc la violation du secret de l’instruction, n’entraîne pas seulement la sanction du journaliste, mais elle constitue une obstruction au déroulement d’un procès juste et équitable.
Le reportage sur les secteurs de la justice et de la sécurité est essentiel pour vérifier que ces derniers respectent les droits et obligations qui découlent de ces principes. Le travail des journalistes contribue ainsi à créer les conditions nécessaires pour que les secteurs de la justice, de la sécurité et de la défense nationale fonctionnent dans le respect d’une gouvernance démocratique, de l’État de droit et des droits de l’homme.
Je précise que la médiatisation des procès n’est pas, d’un point de vue abstrait, bonne ou mauvaise. Elle peut être dommageable lorsqu’elle intervient à mauvais escient. Autrement dit, le risque réside moins dans la médiatisation en soi des procès que dans leur médiatisation intempestive ou tendancieuse. Telle est la raison qui a motivé la décision du tribunal ad hoc de Dixinn de permettre la radiodiffusion des sessions du procès du 28 septembre.
Cependant, il faut rappeler que si les articles, qui relatent les affaires, peuvent potentiellement contenir un certain nombre d’informations typiquement pertinentes, d’un point de vue juridique, dans les faits, il peut s’avérer que les journalistes ou les lignes éditoriales aient la tendance à privilégier certains aspects par rapport à d’autres, sans tenir compte de considérations comme la minorité, la conséquence sur la réputation ou sur l’intimité des personnes impliquées, notamment les mineurs, qui justifient le huis clos applicable aux procédures sensibles.
Le déroulement du procès des événements du 28 septembre n’y fait aucune exception. La publicité, résultant de la retransmission en directe, sera limitée dès lors que des questions sensibles de protection de la vie privée émergeront.
Je conclurais cette partie par la précision que la limitation universelle à la liberté de couverture médiatique obéit au principe selon lequel la presse respecte la vie privée et l’intimité de l’être humain. Cependant, si le comportement en privé d’une personne affecte les intérêts publics, il peut être évoqué dans la presse. Ce faisant, il convient de vérifier si les droits de la personnalité de tiers non concernés ne sont pas affectés par la publication ou la retransmission en directe
Toute couverture médiatique doit être soumise au principe de prudence, d’objectivité, d’impartialité, d’indépendance et à la primauté de la loi rigoureusement respectée par le journaliste. On peut se féliciter que déroulement du procès du 28 septembre n’ait pu être émaillé de telles difficultés.
Notons, enfin qu’un chroniqueur judiciaire doit être bien formé et objectivement informé, c’est-à-dire qu’il ne se limite pas à sa formation de journaliste, puisqu’avoir ou acquérir de solides connaissances du droit et du système judiciaire est essentielles pour la compréhension des termes et concepts et principes de droit, mais aussi des règles qui gouvernent les différentes étapes de la procédure. L’ensemble de ces prérequis journalistiques et procédurale doit être mis à contribution pour rendre convenablement compte d’un procès.
Sur ces réflexions d’une profane en journalisme, je déclare ouvert le présent atelier sur le « Renforcement de capacités des Médias en techniques de couverture d’un procès sensible, le procès des évènements du 28 septembre 2009.
Je vous remercie et vous souhaite plein succès.