Les magistrats marquent un répit: une évidence face au principe de la réalité (Par Mognouma)

L’assemblée générale extraordinaire de l’association des magistrats a accouché d’une décision. L’expression de l’évidence face au principe de la réalité. On a décidé de marquer un répit. De l’attitude irréductible et inflexible affichée tout au départ, avec un discours sans équivoque, l’AMG a fini par se convaincre qu’il fallait changer de paradigme face à la détermination du ministre de mater fort, sans commisération, le débrayage. Pour cela, les magistrats marquent une pause indispensable face à plus fort qu’eux.

Ce vendredi, ils ont décidé de suspendre leur mot d’ordre de grève. Ce qui veut dire qu’ils devraient très rapidement reprendre le chemin des cours et tribunaux. Ils évitent ainsi l’effondrement du mammouth auquel ils ont l’obligation de garantir un minimum de pouvoir de dissuasion. Les signes ne trompent pas. Les 15 magistrats frappés au portefeuille, le langage sans concession du ministre face aux grévistes, la reprise progressive des audiences étaient la preuve que l’unité allait inévitablement voler en éclats. Ce sont là les évidences qui ont pesé. Toute autre raison avancée serait du vernis .

Mais par contre, il faut craindre la victoire à l’usure et au moyen de la répression. Charles ne va plus désormais se fixer des limites. D’ailleurs, il persiste déjà dans ce que tous les professionnels appellent une violation flagrante de la loi.
Cette crainte de l’excès de pouvoir et de la démesure préoccupe autant les personnes dont l’analyse peut transcender les émotions.

Par contre, dans l’opinion, on n’en a cure de ce qui arrive aux magistrats qui, malheureusement, se sont livrés en spectacle tout au début de la transition en s’accusant et s’excusant sans pouvoir changer.

« Ces magistrats aussi, on ne peut pas les défendre. Ce ne sont pas eux qui ont dit devant le colonel qu’ils subissaient la pression de l’exécutif ? Ils se sont laissés faire à l’époque quand on leur dictait des choses, mais cette fois, se font entendre parce que ça a touché leurs propres personnes », s’indignent des citoyens dans les quartiers, qui disent être victimes de certains de ces magistrats.

Faut-il alors s’en réjouir ? Non ! « L’injustice doit être combattue, même si ça concerne celui qui s’est rendu régulièrement coupable d’injustice », a toujours défendu l’ancien ministre des droits de l’homme, Khalifa Gassama.

Ce qui est regrettable dans tout ça, c’est le silence du Conseil supérieur de la magistrature. L’entité la mieux placée pour recadrer et qui a le pouvoir d’attaquer en justice les décisions illégales du ministre, se tait sur une violation du statut de la magistrature qu’elle est en charge de défendre, à tout prix. Mais se laisser surprendre par un tel silence, c’est oublier qu’on est en Guinée. Un pays dans lequel la devise, la vraie, c’est : ‘’d’abord soi, la république et la nation, après’’.

Mognouma Cissé