JMLP : Difficultés des Hommes de médias, Remarques et recommandations, voici le discours intégral du SPPG
DISCOURS DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DU SYNDICAT
DES PROFESSIONNELS DE LA PRESSE DE GUINÉE(SPPG)
TENU AU SIEGE DE LA HAUTE AUTORITE DE LA
COMMUNICATION (HAC), À L’OCCASION DE LA
JOURNÉE INTERNATIONAE DE LA LIBERTÉ DE LA
PRESSE 2023
Le 25 août 1958, le leader syndical; le camarade Ahmed
Sékou TOURE prononçait dans cette salle historique un
discours exprimant la volonté du peuple de Guinée à
reconquérir sa liberté perdue depuis la pénétration coloniale.
Aujourd’hui nous sommes le 3 mai 2023, environ 65 ans
après, vous avez encore dans cette même salle du palais du
25 Août, un autre syndicaliste qui va prononcer son discours
pour exprimer cette fois-ci, la volonté des professionnels de
l’information à continuer la lutte pour préserver jalousement
la liberté de la presse en Guinée et améliorer nos conditions
de vie et de travail.
Je sais aussi que chacun des acteurs ici présents est animé
par la volonté de voir notre chère patrie citée parmi les bons
élèves en matière du respect de la liberté d’expression qui
reste ‘’la clé de voute des droits humains’’ comme l’indique
le thème choisi cette année pour célébrer une journée si
symbolique pour les professionnels de l’information et tous
les défenseurs du droit à la libre expression.
I-DIFFICULTÉS RELATIVES À l’EXERCICE LIBRE DU
METIER DE JOURNALISTE
Parlant des difficultés liées au libre exercice de notre métier,
je vais revenir sur quelques données du rapport annuel du
SPPG sur la liberté de la presse en Guinée. La première
édition de ce document publié en janvier 2023 prend en
compte la période allant du 1er janvier au 31 décembre
2022.
Fruit d’un travail rigoureux et dépassionné, le rapport a
commencé par signaler des actes posés en faveur des
hommes de médias comme l’octroi par l’Etat, d’un bâtiment
qui abrite présentement la maison de la presse à Conakry, un
bâtiment pour chacune des maisons de la presse des 4
régions naturelles du pays, la revalorisation du montant de la
subvention allouée à la presse.
Le rapport mentionne également qu’au cours de l’année
2022, aucun journaliste n’avait fait l’objet de poursuites
judiciaires en lien avec l’exercice de son métier.
Ce climat apaisé des premières heures du CNRD qui avait
commencé à raviver l’espoir chez les hommes de médias
connaitra un tournant inquiétant à partir du 10 mai 2022;
date à laquelle le journaliste Mohamed M’bemba CONDE sera
sauvagement battu à Kindia par des gendarmes alors qu’il
couvrait les opérations de récupération des domaines de
l’Etat conduites à l‘époque par le préfet.
De ce jour à la fin de l’année, le syndicat des professionnels
de la presse de Guinée a enregistré 25 actes et actions
liberticides minutieusement vérifiés. Ce qui fait environ 2
cas chaque mois en moyenne.
Partant du nombre des atteintes recensées par zone, la
capitale Conakry a battu le triste record avec 20 actions
liberticides sur les 25 enregistrés, suivi de Kankan(2 cas),
Kindia(1 cas), Boké(1 cas) et Dinguiraye dans Faranah(1 cas).
Les personnes ou services mis en cause par le rapport sont
entre autres: des militaires (4 cas), des gendarmes (3 cas), le
parquet général près la cour d’appel de Conakry, la mairie
de Kaloum , le préfet de Dinguiraye (1 cas chacun) et la HAC
citée pour vices de procédure. Au niveau de la classe
politique, ce sont 2 compagnons du président du bloc libéral
et l’ancien député de Dixinn également président du parti
Guinée pour le développement et l’équilibre qui sont mis en
cause dans le rapport.
On note aussi 5 cas de journalistes agressés par des
manifestants ou contre manifestants. Mais également, des
menaces de mort et des pratiques de filature de la part des
inconnus (4 cas).
L’un des enseignements à tirer de cette étude, est que nos
agresseurs se trouvent pratiquement dans tous les milieux
socioprofessionnels du pays, si fait qu’on se demande
désormais auprès de qui devons-nous nous sentir en
sécurité?

II-REMARQUE
Cette question nous préoccupe particulièrement car aucun
des 25 atteintes comptabilisées en 2022 n’a fait objet de
poursuites judiciaires ni de mesures disciplinaires ou
administratives. La conséquence majeure de cette impunité
est que le danger qui pèse sur les professionnels de
l’information persiste encore. Rien qu’au cours du premier
trimestre de 2023, le syndicat a enregistré déjà 7 cas vérifiés
alors qu’à la même période en 2022, on était à seulement un
cas. Avec la montée en flèche de la courbe donc, si rien n’est
fait pour freiner cette allure liberticide on risque de se
retrouver avec plus de cinquante cas avant le 31 décembre
prochain.
Tout au long de l’année, le SPPG s’est farouchement opposé à
ces abus et velléités de musellement pour non seulement
permettre aux journalistes d’exercer en toute sécurité, mais
aussi, aider notre pays à améliorer sa note; ou tout au moins,
garder le score honorable qu’on avait obtenu l’an dernier
dans le classement mondial de reporters sans frontières.
Malheureusement, ceux qui aiment ternir l’image de notre
chère patrie ont fait que la Guinée a perdu un point cette
année. De la 84e place l’an dernier, on se retrouve
aujourd’hui au 85e rang. Nous sommes devancés par la
plupart des pays voisins notamment la Gambie 46e
, la Côte
d’Ivoire 54e
, le Burkina Faso 58e ou encore le Libéria, la Sierra
Leone et la Guinée Bissau qui occupent respectivement les
66e
, 74e et 78e places.
Ce recul doit nous interpeler tous et chacun de nous peut
jouer sa partition pour inverser la tendance.
III-Recommandations
Pour inverser justement la tendance après ce constat amère,
le syndicat des professionnels de la presse de Guinée
recommande:
1-Au Président de la transition le colonel Mamadi
DOUMBOUYA, de rester dans la logique des discours et actes
rassurants ayant caractérisé les premières heures de son
régime. Surtout de permettre aux médias sans distinction
d’avoir accès aux informations de la Présidence de la
République à travers notamment une couverture médiatique
diversifiée de ses cérémonies officielles qui se tiennent au
palais et en dehors du palais;
2-Au conseil national de la transition CNT, à la haute autorité
de la communication HAC et au ministère de l’information et
de la communication, d’œuvrer pour la révision des textes de
loi afin de renforcer davantage la liberté de la presse. Des
textes qui devront prévoir désormais des sanctions sévères
contre tout agissement portant atteinte à cette liberté
indispensable à la bonne marche de la démocratie;
3-A la justice, de poursuivre tous les auteurs d’agressions
contre les journalistes et d’autres formes d’atteinte à la
liberté de la presse afin qu’ils servent d’exemple pour
d’éventuels candidats à ces actions liberticides;
4-Aux autorités civiles et militaires dont relèvent des agents
hostiles aux hommes de medias, de prendre des mesures
disciplinaires rigoureuses à leur encontre comme l’a fait cette
année le maire de la commune de Ratoma qui a suspendu le
11 avril dernier un conseiller communal impliqué dans
l’agression du journaliste Sayon CAMARA d’Africa Guinée;
5-Aux responsables des services de défense et de sécurités,
d’instaurer des communications de sensibilisation sur la
liberté de la presse lors des rassemblements hebdomadaires;
6-Aux institutions internationales et représentations
diplomatiques établies en Guinée, d’accompagner le SPPG
dans le processus de mise en place d’un fonds d’aide
juridictionnelle en faveur des journalistes agressés dont
beaucoup ont souhaité poursuivre leurs agresseurs mais
souvent empêchés par manque de moyens financiers;
7- Aux professionnels des médias, de respecter l’éthique et
la déontologie dans l’exercice de leur profession.
8-Aux associations patronales de presse, de revenir autour de
la table pour la suite de nos négociations pour qu’on signe
enfin la convention collective des journalistes sans laquelle,
notre corporation finira par cesser de donner des leçons de morale aux acteurs des autres domaines de la vie
sociopolitique.
Je souligne que la convention collective constitue le principal
point de nos doléances et revendications. Elle est également
pour nous, la solution globale à l’essentiel des préoccupations
des employés des médias guinéens. Laissez-moi donc vous
livrer quelques conclusions issues des consultations
numériques que le bureau exécutif du SPPG a menées en
prélude à cette journée pour voir jusqu’à quel point il est
grand temps et plus urgent d’agir:
-Ces consultations nous ont permis de savoir qu’il y a encore
dans notre pays, des salaires dont les montants n’atteignent
même pas l’ancien SMIG qui était de 440.000 GNF pendant
que dans d’autres secteurs on trouve même insuffisant le
nouveau MIG qui est fixé par les nouvelles autorités à
550.000 GNF;
-A la triste réalité des salaires dérisoires, s’ajoute celle de
l’épineuse question des arriérées éternellement impayées,
sans oublier que ces employés de medias ne sont pas
enregistrés à la caisse nationale de sécurité sociale et ne
bénéficient d’aucun système d’assurance maladie;
-Entre novembre et décembre 2022, nous avons travaillé avec
Monsieur Tam CAMARA de l’AGUIPEL sur un dossier qui fait
particulièrement saigner les cœurs des âmes sensibles.
techniciens des médias du pays travaillent au-delà des 48h
par semaine fixée par le code du travail ce, sans payement
des heures supplémentaires, ni d’autre forme de
compensation;
-L’association des chroniqueurs islamiques de Guinée aussi
qui est également affiliée à notre syndicat recommande à ce
que ses membres soient pris en compte pendant les
formations dédiées aux journalistes notamment à l’approche
d’importants évènements comme les élections nationales
-La plupart des préoccupations des journalistes de Conakry et
ceux de l’intérieur du pays se recoupent. Cependant, les
derniers ont tenu à mentionner qu’ils se sentent souvent
oubliés, sinon minimisés comme si le monde des médias se
limitait à Conakry;
-Pour finir et nous tenons vraiment à cette dernière
recommandation qui est transversale par le fait qu’elle est
adressée à la fois au gouvernement, à la HAC, aux
représentations diplomatiques établies en Guinée mais aussi,
aux partenaires techniques et financiers.
Les pauvres et très vulnérables employés des médias
guinéens vous prient humblement de suspendre la
subvention allouée à la presse et toute autre aide jusqu’à la
signature de la convention collective entre les organisations
patronales de presse et le syndicat des professionnels de la
presse de Guinée(SPPG).
Les aides destinées directement aux employés par le canal du
syndicat ou d’autres organisations de journalistes et
techniciens ne sont pas concernées par ce veto sollicité.
-Vive la liberté de la presse!
-Vive le SPPG!
-Camarades salut!