Une junte au style agressif face à une classe politique qui se défend pied à pied, mais jusqu’à quand ?
C’est une classe politique qui a accepté de patauger dans la boue, qui garde ses distances et qui en épouse des moeurs, dans l’exacte mesure où il le faut, pour ne pas être dévorée, charcutée par une junte militaire au style agressif, au ton arrogant et au comportement méprisant qui voit sa popularité s’émietter, dégringoler voire même s’évaporer avec son mythe s’amoindrir.
Alors que le péril disparait quand on ose le regarder, la classe politique guinéenne fort de sa caporalisation de l’opinion face à un régime qui n’a de moral à faire, ni d’exemple à montrer décide dans sa plus grande douleur de prendre son destin en main sans assez de bravoure. Chacun, sans doute et par petit calcul politique fait tout pour éviter la rupture totale avec les putschistes du CNRD. Chaque parti muscle et démuscle en même temps pour ne pas servir de dindon de la farce.
Cette hésitation n’étant bien plus qu’une capitulation aux yeux d’une opinion à la quête de solution, s’étouffe par la stratégie moins payante d’une classe politique qu’elle estime peureuse et pleureuse devant l’éternel.
La menace de dissolution des partis a-t-elle son effet ?
Face aux politiques, spécialistes de coup de poing en dessous de la ceinture, l’UFDG fait preuve de prudence et de retenue. Son leader sans cesse victime et éprouvé par de nombreuses trahisons ne veut pas donner la corde à des haineux qui n’attendent que la moindre erreur de sa part pour le pendre politiquement. D’où ce retrait assez millimétré de l’UFDG et de son leader.
La junte militaire aujourd’hui déplumée par ses incohérences, déshabillée par ses atermoiements et rejetée par l’opinion veut couler avec la vieille classe politique contre qui elle ne cache plus son désamour, son mépris et sa haine. A cet effet, elle court derrière ne serait-ce qu’une virgule compromettante ou un point mal placé pour éteindre les vieux partis devenus gênants.
Les putschistes du 05 septembre sans sympathie personnelle qui roulent pour eux-mêmes, ont voulu abattre après avoir sali de la manière la plus sale des hommes d’État, d’expérience et de parcours brillants mais qui ont misérablement échoué dans leur plan d’élimination politique, deviennent de plus en plus violents.
Mais cette fois-ci, la classe politique qui jusque-là, hésitait à prendre des risques dans une union de traîtres et aux multiples facettes, aucun ne voulait être en première ligne du combat face au CNRD.
Sans attaquer, la classe politique se défendait pied à pied même si la stratégie est reprochée par endroit mais nul ne pouvait l’accabler dans son excès de calme ou retrait politiquement stratégique.
Pour reprendre François René de Chataubrilland en terme facile : Lorsque la gouvernance atteint la limite des services et des privilèges, elle verse dans les abus. Le CNRD se laissera-t-il dominer par ses passions liberticides et extrêmes pour mettre à exécution sa volonté soupçonnée de dissoudre des partis politiques pour avoir bravé des interdits illégaux ?
J’en doute très fort. Puisque la classe politique a décidé de sortir de son jeu de cache cache, tout porte à croire que désormais le plus difficile commence pour la junte qui sera confrontée aux dures épreuves de la réalité du pouvoir, avec la fin du mois de Ramadan 2023.
L’ultime face à face ou l’inévitable rapport de force, longtemps reporté au profit d’un compromis qui ne vient toujours pas, aura lieu, très bientôt. Car Mamadi kaa fow kono Ama khè (Mamadi a dit mais il n’a pas fait). C’est une évidence que le 05 septembre est un gros canular vendu aux Guinéens.
Rien n’a changé, c’est d’ailleurs, le pire.
Cellou, Sidya et Koundouno sont en exil.
Foniké, Ibrahima, Billo, Kassory, Damaro, Diané, Oyé croupissent dans les tristes gêoles du CNRD avec la bénédiction d’une justice qui refuse de faire sa mue. Des opposants placés sous contrôle judiciaire pour avoir soutenu une marche, consacrée par la charte unilatérale du même CNRD.
Des marchés gré à gré, des nominations clientélistes, la corruption, les assassinats de près de 20 jeunes.
Qu’est-ce qui a changé fondamentalement depuis le coup de force sanguinaire du 05?
C’est qu’Alpha Condé et son gouvernement sont tombés. Ensuite, La Présidence a changé de siège et de main. Mais au fond, c’est de mal en pis !
Par Marouane Camara